4 - Biologie du silicium

4.1. Répartition du silicium

La quantité totale de silicium dans le corps humain est estimée à 7 grammes, ce qui en ferait le douzième élément par ordre d’abondance dans le corps humain. Le silicium est présent principalement sous forme inorganique (dont les poumons détiennent sans doute une bonne part). Seule la fraction organique, soit 10 % environ, possèderait une fonction biologique. Cette forme diminuerait notablement à partir de l’âge de dix ans (Cette étude relativement ancienne n’a jamais été réévaluée depuis 1925. Les méthodes et les précautions de dosage ayant beaucoup évolué (avec généralement évaluation à la baisse de résultats anciens), un réexamen de cette question ne serait pas superflu).

A titre de comparaison, voici les quantités des autres éléments calculées pour un humain de 70 kg :

O

43 000 g

Fe

4.2 g

As

18 mg

C

16 000 g

F

2.6 g

Se

14 mg

H

7 000 g

Zn

2.3 g

Sn

14 mg

N

1 800 g

Rb

680 mg

Mn

12 mg

Ca

1 000 g

Sr

320 mg

Co

1.5 mg

P

780 g

Br

260 mg

Zr

1 mg

K

140 g

Pb

120 mg

Ni

1 mg

S

140 g

Cu

72 mg

Li

0.67 mg

Na

100 g

Al

61 mg

V

0.1 mg

Cl

95 g

Cd

50 mg

U

0.09 mg

Mg

19 g

Ba

22 mg

Be

0.036 mg

Si

7 g

I

12 - 20 mg

 

 

Les quantités de silicium présentes chez l’homme, du même ordre de grandeur que le fer, et à peine moins que le magnésium, n’en font pas vraiment un oligo-élément au sens strict du terme. 

À quoi peut bien servir tout ce silicium ?  

Si 10 % du silicium présent dans l’organisme a bien un rôle organique comme le proposent certains (liaison covalente dans des complexes pentacoordinés par ex.), on obtiendrait une concentration moyenne de 10 ppm soit 10 mg/kg de tissu. En fait cette répartition est très hétérogène.

La concentration sanguine est de l’ordre de 1-10 mg/L chez l’homme. Les concentrations évaluées par spectrométrie d’émission donnent :

sang total    0.3 -  33   mg/L
sérum         0.4 -  39    "
plasma        0.2 -  68    "
urine         0.3 - 180    "        

Les importantes variations dépendent essentiellement du régime alimentaire et du délai de prélèvement post-prandial. Le silicium urinaire serait essentiellement sous forme de silicate de magnésium. Il apparaît ainsi qu’aucune estimation des stocks totaux en silicium organique n’est possible à partir des données sanguines

4.1.1. Répartition tissulaire

La répartition tissulaire du silicium montre d’assez grandes variations relatives d’un auteur à l’autre. Les valeurs sont très difficiles à comparer, du fait des difficultés pratiques du dosage, de l’unité utilisée (silicium en fonction du poids frais, du poids sec ou du contenu en azote), sans parler des différentes méthodes utilisées. Les valeurs suivantes sont tout de même indicatives (tous les résultats d’un même tableau sont obtenus par le même auteur) :

mg Si /100 mg azote

Homme

Rat

Lapin

aorte

105 ± 12

274 ± 24

503 ± 75

rate

98 ± 44

21 ±  5

 

tendons

91 ± 24

108 ± 19

 

muscles

60 ± 21

 

 

surrénales

47 ± 27

108 ± 25

 

pancréas

44 ± 12

60 ± 16

90 ±  2

foie

39 ± 28

33 ± 19

39 ± 18

rein

38 ±  4

31 ±  4

14 ±  4

myocarde

18 ±  5

25 ±  5

18 ± 15

poumons

 

70 ± 16

 

thyroïde

 

42 ± 13

 

cerveau

traces

 

 

iris

 

 

440 ± 17

cornée

 

 

400 ± 58

sclérotique

 

 

137 ± 46

cristallin

 

 

28 ±  5

d’après Jacqueline Loeper

 

mg % de tissu sec

Homme

Chien

Bœuf

Lapin

thymus

310

 

 

 

surrénales

250

 

 

 

poumons

40 - 90

116

103 - 109

160

pancréas

30

 

 

 

rate

28

 

 

 

foie

8.7

 

81 - 87

25

myocarde

8

 

 

 

rein

6.1

31

 

16

muscles

2 - 8

 

15

 

sang

0.9

 

 

 

d’après RH MONCEAUX

Les comparaisons de taux de silicium par tissu d’une espèce animale à l’autre sont assez difficiles, peu d’auteurs ayant travaillé sur plusieurs espèces et dosé suffisamment de tissus.

Un des tissus les plus riches, qui ne se trouve pas dans ces tableaux, est la peau, et les phanères dans leur ensemble (peau, cheveux, ongles, griffes, cornes) sont abondamment pourvus en silicium. Les cheveux (cendres) contiennent 6 % de silice, les cheveux blonds étant les plus pauvres. Les cendres d’ongles contiennent 18 % de silice.

On peut remarquer que les tissus qui se trouvent au contact des pressions partielles d’oxygène les plus élevées : la peau (sans compter les muqueuses, qui de l’avis général, mais sans chiffres précis, sont très riches en silicium - en rapport sans doute avec le contenu en GAG), les enveloppes de l’œil, les poumons, les parois artérielles sont aussi ceux qui contiennent le plus de silicium. Est-ce un hasard ?

Une des résultats qui interpelle le plus fortement sur les relations silicium-vieillissement est l'étude suivante réalisée chez le lapin.

Les taux tissulaires de silicium resteraient quasiment constants au cours de la vie dans le cœur, les reins, les muscles, les tendons dans plusieurs espèces animales (lapin, rat, poulet, porc). Par contre pour ces espèces, comme pour  l’espèce humaine, les taux de silicium dans la peau, le thymus, les parois artérielles diminuent notablement avec l’âge (mauvaise assimilation progressive par l’organisme, alimentation carencée, augmentation des pertes ?), tandis qu’ils augmentent dans les poumons (silicium minéral dû à l’inhalation de poussières), les ganglions lymphatiques.


d’après Jacqueline Loeper

Une chose frappe quand on consulte la littérature, c’est la disparité des résultats concernant le cerveau. Pour certains, il est très pauvre en silicium, pour d’autres c’est un des organes les plus riches, avec même des variations notables de concentrations selon les régions cérébrales.

 

4.1.2. Répartition extra-cellulaire

Le silicium est un élément de structure des tissus conjonctifs. Ceux-ci forment en quelque sorte le squelette extra-cellulaire des cellules. Ils sont d’une importance extrême dans les échanges et communications intercellulaires. Ils assurent en particulier l’hydratation péri-cellulaire, hydratation sans laquelle aucune molécule, grande ou petite, ne pourrait diffuser et donc atteindre sa cible (messagers, métabolites intermédiaires, ions) ou être évacuée (catabolites).

Le silicium se trouve être un constituant à part entière des principales macromolécules (en quantité) de la matrice extra-cellulaire :

 

 

Silicium (µg/g)

GLYCOSAMINOGLYCANES

 

libre

total

lié (total - lié)

Acide hyaluronique

 

 

cordon ombilical humain

25

354

329

 

cordon ombilical humain

1533

1892

359

 

humeur vitrée bovine

980

949

-

Chondroïtine-4-sulfate

 

 

cartilage costal de rat

30

361

331

Chondroïtine-6-sulfate

 

 

cordon ombilical humain

45

123

78

 

cartilage humain

36

227

191

Dermatan sulfate

 

 

muqueuse de porc

46

548

502

Heparan sulfate

 

 

poumon de bovin

39

466

427

Héparine

 

 

muqueuse de porc

33

175

142

Keratan sulfate-1

 

 

cornée de bovin

31

37

-

Keratan sulfate-2

 

 

cartilage costal humain

37

105

68

POLYURONIDES

 

Pectine

 

 

citron

5

2586

2581

Acide alginique

 

 

 

prêle (horsetail kelp)

-

43

-

 

prêle (horsetail kelp)

5

456

451

d’après K. Schwartz

L’acide hyaluronique (en particulier cordon ombilical humain) est la macromolécule la plus riche en silicium : jusqu’à 1892 µg de silicium total par gramme. C’est aussi une des molécules qui fixent le mieux l’eau : on retrouve l’aptitude de la silice à former des gels

Le silicium se retrouve dans tous les glycosaminoglycanes et polyuronides : chondroïtine sulfate, dermatan-sulfate, kératan-sulfate, héparan-sulfate et héparine. Il est également retrouvé comme constituant du collagène isolé (3 à 6 atomes de silicium par chaîne alpha de collagène) et d’autres glycosaminoglycannes (héparane, dermatane, chondroïtine-4-sulfate).

Carlisle rapporte que le silicium fait partie intégrante de la chitine (carapace des crustacés et insectes).

La fixation est supposée se faire par liaison éther (º Si – O – R –) sur les groupements hydroxyles des sucres. D’autres pensent que la stabilisation ...

Teneur en silice des différents constituants de la paroi artérielle (aorte), chez l’homme :

collagène (sec)

 220       µg/g

élastine (30-40% du tissu aortique)[1]

 500 - 170 µg/g

mucopolysaccharides acides

1270 - 300 µg/g

selon qu’il s’agit se sujets jeunes (valeurs élevées) ou plus âgés avec des pathologies diverses.

Malheureusement, aucune étude n’a été faite sur les proportions de silicium libre et lié dans l’élastine. Le parallélisme que font certains (Ladislas Robert et coll.) entre le caractère plus ou moins dégradé de l’élastine de la matrice extra-cellulaire et le stade de vieillissement des organismes pourrait faire du silicium un marqueur privilégié, et peut-être un outil thérapeutique généralisable (cf. Chapitre 7 : Discussion et hypothèses : silicium et vieillissement).

 

4.1.3. Répartition intra-cellulaire

La microanalyse aux rayons X a montré la présence de silicium dans le centriole (cellules rénales de cobaye) et dans le noyau des spermatozoïdes.

L’analyse de mitochondries de cellules hépatiques a mis en évidence des structures denses contenant surtout du silicium dans la région de la matrice. Deux types de granules contenant du silicium ont été observé dans ces mitochondries :

· des granules de 5 à 15 nm de diamètre ;

·   des gros granules de 25 à 75 nm. Ceux-ci apparaissent être des agrégats des petits granules.
L’isolement par centrifugation de ces granules après solubilisation des mitochondries (foie, rate ou rein) par des détergents donne à nouveau deux populations :
·   des granules denses  (10.000 g/10 mn), 5-75 nm de diamètre avec surtout des agrégats de 25 nm ;
· des granules légers (30.000 g/20 mn), 5-10 nm de diamètre.

Les agrégats sont surtout composé de silicium avec de petites quantités de phosphore, soufre et chlore, les granules isolés contenant davantage de phosphore que de silicium. Le calcium n’est pas détectable dans ces granules, que ce soit in situ ou après isolement. Les granules de mitochondries de rate contiennent beaucoup plus (2.5 fois) de silicium par gramme de poids frais que ceux de rein et presque 5 fois plus que ceux de foie. (Il aurait été intéressant de relier ces valeurs au métabolisme oxydatif des cellules de ces organes).

La silicase - enzyme dont l’existence avait été supposée par Charnot - a été identifiée dans la paroi des mitochondries. Son activité catalytique consisterait à libérer la silice de complexes moléculaires supposés la contenir. Malheureusement, une seule équipe a découvert et étudié cette enzyme en utilisant pour substrat un composé synthétique, le(s) substrat(s) naturel(s) restant élusif(s).

 

4.2 Capture et distribution

Relativement peu de choses sont connues sur la capture du silicium dans les systèmes vivants. Chez les mammifères supérieurs, le silicium alimentaire, sous forme de silice SiO2, de silicates et de silicium organique essentiellement apportés par les végétaux, est absorbé rapidement au niveau intestinal. Il est présent dans le sang et les liquides extra-vasculaires sous forme Si(OH)4 non dissocié au pH de l’organisme, en quasi totalité (>98 %) sous forme libre non lié aux protéines. Très diffusible, sa distribution est égale dans le plasma et les érythrocytes. Pour certains ce taux sanguin ne varierait pas ou peu au cours de la vie, pour d’autres il augmenterait légèrement avec l’âge.

L’élimination du silicium (charge de silicium minéral) est essentiellement rénale (50 % dans les urines après 2 heures, 75 % après 4 heures) : clairance d’environ 90 ml/mn et excrétion fractionnelle de l’ordre de 90 %. L’excrétion urinaire est de l’ordre de 33 ± 4 mg/jour pour des apports alimentaires moyens de 20 à 50 mg/jour. La concentration urinaire du silicium est étroitement corrélée avec celle du magnésium par suite d’une élimination préférentielle sous forme de silicate de magnésium.

Une heure après injection de silicium (31Si), la moitié du silicium se trouvent dans les trois organes les plus importants en masse (muscles, peau et os). Le foie semble présenter une captation active et le poumon séquestrerait le silicium à partir du plasma. Il n’y a aucune captation par le cerveau dans ce type d’expérience.

 

 

 

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Création le 2 novembre 2007